Sortie de l’Attoungblan de la génération Bénipouê d’Ebrah

Situé près des quartiers Elokaté et Elokato dans la ville de Bingerville, Ebrah est un village abouré, fief du peuple Ossouhon. Le samedi 10 août, le village a vibré au rythme de l’Attoungblan, un tam-tam parleur sacré, lors de sa sortie officielle après 34 ans de silence. Abel Wognin, chef de la catégorie Bénipouê-Bowlé, nous donne l’essence de ces festivités.

Une semaine durant, Ebrah s’est animé au son des tambours, des chants, des danses et d’une cuisine locale exquise, accompagnant les cérémonies avec une richesse culturelle et culinaire inégalée. Cette cérémonie exceptionnelle a marqué le retour de l’Attoungblan après 34 ans, symbolisant le renouveau de la génération Bénipouê.

La génération, une tradition ancestrale

La génération, une tradition ancestrale
La génération, une tradition ancestrale

Ebrah, comme l’ensemble des peuples abouré, est une monarchie héréditaire structurée autour du roi et des notables, représentants les familles du village.  Ebrah compte 24 familles y compris celle du roi. De ces familles, découlent les différentes entités ayant droit de gouverner la communauté. Les générations constituent l’exécutif de la communauté.

D’une part, l’on a le roi et ses notables puis d’un autre on a les générations qui gèrent les affaires courantes du village. 

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La génération a avant tout, un rôle militaire, assure la sécurité de la communauté. Elle a également un rôle de développement économique et social du village. Ce sont les générations qui par leurs actions impulsent le progrès et contribuent à l’essor de l’économie.

La génération est constituée de quatre catégories : les Attiblé, les Bowlé, les Djaman
minliblé, et les Djamian. Ebrah est divisé en deux quartiers à savoir Begnini et Tchagba. Au sein de chaque quartier l’on trouve deux générations. À begnini on a les générations Benipouê et Blessoué.   Dans ce quartier, la gouvernance se fera par l’une ou l’autre de ces générations au bout de 25 ans, un système par alternance très bien huilé. Le système de gouvernance d’Ebrah, rigoureusement organisé, ne nécessite pas de vote

Au sein de chaque génération, il existe des fonctions. Celles-ci sont attribuées à des familles. Ce qui fait par exemple qu’on ne peut prétendre au fauteuil de chef si l’on est issu de la famille royale. Le premier chef de génération est issu de la famille Vagbè et son second de la famille Olupié.

Le rôle des catégories

Le rôle des catégories

Les Attiblé représentent les aînés. Ils ont pour mission principale de concevoir les stratégies et de guider la communauté. Ils sont responsables de la planification et de la réflexion sur les grandes orientations à suivre. Leur rôle est principalement stratégique, sans implication directe dans les combats, car ils ne participent pas aux conflits.

Les Bowlé constituent le bras militaire de la génération. Les membres des Bowlé sont chargés de mettre en œuvre les stratégies élaborées par les Attiblé. Ils sont les guerriers qui défendent activement la communauté sur le terrain. En cas de conflit majeur, si la force des Bowlé s’avère insuffisante, les Djamian minliblé sont appelés en renfort.

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Les Djamian minliblé peuvent constituer un renfort militaire, Djamian minliblé interviennent lorsque la situation dépasse la capacité des Bowlés. Ils apportent un soutien crucial lors des combats intenses, assurant ainsi la défense efficace de la communauté.

Les Djamian, considérés comme les plus jeunes, ont un rôle d’apprentissage. Ils restent aux côtés des Attiblé pour acquérir les connaissances et compétences nécessaires. Leur formation est essentielle pour garantir une transition harmonieuse des responsabilités à l’avenir.

L’Attoungblan

L’Attoungblan
L’Attoungblan

La sortie de l’Attoungblan, a lieu tous les 25 ans, revêt une importance particulière au sein de la communauté abouré. Elle marque la fin de la formation d’une génération et l’officialisation de leur capacité à assumer pleinement leurs responsabilités. Contrairement à la fête de génération, qui se tient chaque année, la sortie de l’Attoungblan est un événement exceptionnel symbolisant le renouveau et la perpétuation des traditions.

L’Attoungblan, un tam-tam parleur sacré, dépasse le simple statut d’instrument. Sa sortie officielle est un moment solennel qui marque l’entrée en fonction des membres de la génération, reconnus désormais aptes à protéger, développer et guider la communauté. Cet événement se distingue nettement de la fête annuelle de génération par sa rareté et son caractère sacré.

Mission de la catégorie Bénipouê-Bowlé

Les Bénipouê constituent une génération, celle qui était en fête. Ses membres ont connu une initiation qui a duré 14 ans. Celle-ci a consisté à apprendre les us et coutumes, et maîtriser l’attoungblan, le tam-tam parleur. Cette initiation a été faite par leurs pères de la génération Bloussoué. Deux après leur sortie officielle, les Benipouê auront en charge la gouvernance du quartier et dix après, ils auront celle du village.

Avec le temps, les conflits armés inter villages se sont estompés. Aussi avec la modernisation, les différentes strates qui composent l’organisation de ces villages ont dû réorienter leurs fonctions. Fort de cela, les Bénipouê considérés comme l’armée du village ont opté pour le développement de la communauté et le soutien à la royauté dans sa gouvernance. La génération Bénipouê, consciente des défis contemporains, a choisi de placer son mandat sous le signe du développement durable.

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Pour répondre aux besoins actuels, elle a mis en œuvre une série d’initiatives alignées avec le schéma directeur de développement d’Ebrah 2035. En matière de préservation de l’écosystème lagunaire, Ebrah a lancé l’opération «Ebrah village vert», visant à reboiser les mangroves et à promouvoir l’aquaculture comme levier de développement durable.

En parallèle, la génération Bénipouê a organisé une campagne de sensibilisation et de dépistage pour les femmes, contre le cancer du col de l’utérus, le cancer du sein, et le diabète, avec le soutien du ministère de la Santé et des acteurs locaux.

Enfin, dans un souci de dynamiser l’économie locale et de promouvoir la culture régionale, elle a projeté la création du festival SANFLAN. Cet événement culturel majeur a pour but de valoriser la culture Akan et les traditions guerrières, tout en renforçant l’attractivité touristique de la région.

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