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mardi, avril 23, 2024
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Le nouveau DG du MASA expose sa vision

ABOU KAMATE, a pris les rênes du Marché des Arts et du Spectacle Africain (MASA) en juin 2023. Dans cette interview, il partage sa vision audacieuse pour l’édition d’avril 2024 et les innovations qui marqueront cet événement culturel majeur.

Pouvez-vous rappeler votre parcours professionnel ?

Mon parcours professionnel s’est déroulé principalement à l’international au sein du réseau de coopération français, où j’ai occupé diverses fonctions. J’ai débuté en tant que coordinateur régional pour les établissements culturels en Afrique de l’Ouest, avec un poste basé à Abidjan. Par la suite, je suis parti à Saint-Louis où j’ai exercé en tant que directeur délégué de l’Institut français.

Je reviens en poste à Abidjan à la direction de l’Institut français, où je me suis occupé de la reconstruction de l’Institut et de la relance de la coopération culturelle entre la France et la Côte d’Ivoire. Après cette mission, j’ai été en Afrique centrale plus précisément au Tchad en tant que directeur de l’Institut français, puis en Indonésie, où j’ai occupé le poste d’attaché culturel à l’Ambassade de France tout en dirigeant l’Institut français local.

LIRE ABIDJAN PLANET N°329 (AVRIL 2024)

Après ces expériences internationales, j’ai regagné Paris, où j’ai eu la responsabilité du programme européen de soutien au secteur culturel et de la création en Afrique de l’Ouest, couvrant les 16 pays de la région. J’ai consacré un peu plus de deux années à ce poste avant de me retrouver à la direction du Masa, une nouvelle étape dans mon parcours professionnel.

Qu’est-ce qui vous a motivé à accepter le poste de DG du Masa ?

Ma décision d’accepter le poste de Directeur Général du Masa a été guidée par deux facteurs essentiels. Tout d’abord, l’exceptionnelle réputation du MASA en tant qu’événement culturel de premier plan sur le continent africain a été un élément décisif. Ensuite, il y a eu cet appel profondément enraciné en moi qui est celui de servir mon pays. C’est un honneur de contribuer au développement et au rayonnement de mon pays.

Quelle est votre vision pour le MASA ?

Ma vision pour le Masa est de le voir évoluer en un véritable phare culturel en Afrique et renforcer le statut de carrefour artistique incontournable dont jouit notre pays. Mon ambition est de faire du MASA 2024 une réussite artistique et organisationnelle, sans pour autant denier aux éditions précédentes les efforts consentis. Je souhaite donner au MASA une dimension plus ambitieuse, offrant aux artistes et aux professionnels des opportunités exceptionnelles dans un cadre professionnel de premier ordre. La réussite du MASA 2024 est un défi en raison du temps court pour son organisation.

Quelle est votre stratégie ?

Ma stratégie se fonde principalement sur la consolidation des bases existantes. Je souhaite renforcer nos acquis tout en explorant des pistes innovantes pour maintenir notre position privilégiée sur la scène artistique internationale. Il s’agira de mettre l’accent sur le développement du volet marché, car il demeure l’espace où nos créateurs et groupes artistiques auront l’opportunité de rencontrer des acheteurs, des programmateurs et d’autres professionnels du secteur. Pour y parvenir, nous avons pris la décision de distinguer clairement les appels à candidature, en séparant le Masa marché du Masa festival. Cette clarification a eu aussi le mérite d’éviter désormais la confusion qui existait entre le MASA marché et le MASA festival.

Les activités, des « rencontres professionnelles » sont également pensées en parfaite cohérence et complémentarité avec la programmation du MASA marché. Cela permet aux artistes, après la scène, de se retrouver pour aborder les défis de leurs secteurs et échanger des pistes qui contribuent à l’essor, notamment économique.

Le Masa festival, réservé aux groupes artistiques internationaux c’est-à-dire le reste du monde hors le continent africain sera plus inclusif par rapport aux communes d’Abidjan puisque nous souhaitons que ces groupes aillent vers les publics là où ils se trouvent.

Pouvez-vous énumérer les innovations de cette édition ?

Nous introduisons plusieurs innovations significatives lors de cette édition du Masa :

-Mise en avant de la jeune création et de l’innovation : Nous mettons un fort accent sur la promotion de la jeune création africaine, en accord avec le thème de cette édition : « Jeunesse, Innovation et Entrepreneuriat ». Donc, il s’agit de mettre en avant les créations par et pour les jeunes. Le secteur culturel étant fortement influencé par le numérique, nous travaillons sur les opportunités que cela apporte à la création avec par exemple des expériences immersives pour nos publics. Enfin, le volet économique et entrepreneurial de la culture est abordé au regard du potentiel de ce secteur pour le développement socio-économique pour notre pays.

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-Promotion des femmes artistes : Nous accordons une attention particulière aux femmes qui jouent un rôle essentiel dans le secteur culturel mais qui ne bénéficient pas toujours de la visibilité qu’elles méritent. À partir de cette édition, nous instaurons un prix féminin visant à encourager la créativité féminine sur le continent.

-Plateforme d’interaction pré-événement : Nous avons introduit une plateforme interactive permettant aux acheteurs et autres professionnels de dialoguer avec les artistes avant leur arrivée à Abidjan. Cette plateforme plus intuitive permet aux artistes de présenter en ligne leurs dossiers. Les contacts préalablement noués sur la plateforme faciliteront les échanges pour la conclusion de contrats une fois que les artistes et les acheteurs se retrouvent à Abidjan.

-Appels à candidatures en trois langues : Nous avons lancé les appels à candidatures en trois langues, au lieu des deux habituelles. Les langues étaient le français, l’anglais et le portugais. Pour la première fois, le MASA a reçu près de 2500 candidatures. Cet engouement est inédit.

-Formations multilingues pour les artistes : Nous offrons des formations en anglais et en portugais aux artistes. Les formations sont lancées en amont de la tenue du MASA en avril 2024.

-Village MASA Enfant : Nous avons prévu un espace dédié aux familles, où les enfants auront l’opportunité de découvrir l’ensemble des disciplines programmées au MASA dans un cadre aménagé et adapté. L’idée est de créer une « expérience famille » et susciter l’intérêt des plus jeunes pour la culture.

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Quel nombre de candidatures avez-vous retenu ?

Nous avons reçu près de 2500 candidatures. Dans le cadre du Masa marché, 69 groupes ont été retenus couvrant les sept disciplines artistiques. Cette approche a permis de mettre l’accent sur la qualité de l’accueil et des présentations, tout en offrant aux groupes le temps nécessaire pour créer des spectacles de grande qualité. Quant au Masa festival, nous avons programmé 35 groupes, à la fois ivoiriens et internationaux. Nous allons également offrir des scènes à de nombreux jeunes artistes ivoiriens, afin qu’ils se fassent connaître.

En ce qui concerne la répartition des scènes, nous organiserons des performances artistiques dans différentes communes, notamment à Abobo, où sera érigé un Masa village, ainsi qu’à Yopougon, Cocody et Koumassi. Cette diversité de lieux rend le Masa accessible à un public encore plus nombreux.

Comment sonnez-vous la mobilisation du public ?

Notre stratégie de mobilisation du public s’articule autour de trois phases distinctes : avant le Masa, pendant le Masa, et après l’événement, dans le but de créer une empreinte durable dans l’esprit des Ivoiriens. Cette interview que nous réalisons s’inscrit justement dans la stratégie de communication que nous déployons.

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Nous mobilisons l’ensemble de la presse pour promouvoir activement l’événement, en particulier ici à la Maison du Masa. Il est important de noter la différence entre l’ancienne appellation de nos bureaux et la nouvelle. Avant, l’on parlait de siège du MASA. Désormais, il faut parler de la Maison du MASA. Nous souhaitons que cet édifice devienne un lieu de convivialité, de rencontre et d’échange, ouvert aux artistes et au public. Nous y organiserons divers événements pour signifier aux Abidjanais que le Masa approche à grands pas.

Nous intensifierons nos efforts au fil du temps. Selon notre perspective, la meilleure manière d’y parvenir est de nous rapprocher du public en organisant des représentations délocalisées, notamment à travers des scènes itinérantes. Le projet Masa scène décalé est une déclinaison concrète de cette vision.

Comment le Masa tire-t-il profit du digital ?

Le Masa maximise les opportunités offertes par le numérique de plusieurs manières :

Tout d’abord, nous avons déjà utilisé  le numérique dans le cadre de nos appels à candidatures pour rendre le processus plus accessible et efficace.

Un exemple concret est le passage de la version papier du journal Masa à une version numérique. Cela permet à un public beaucoup plus large d’y accéder facilement.

Le numérique joue également un rôle central dans nos ateliers et dans les travaux du comité artistique international, facilitant ainsi la collaboration et la communication.

Que faites-vous pour la formation des artistes ?

Nos artistes ont déjà bénéficié de formations, mais il est vrai que des besoins subsistent, et le renforcement des capacités constitue l’une de nos missions statutaires au Masa. Des formations en administration, en technique et dans le domaine artistique sont déjà en cours. Elles continueront après la tenue du Masa en avril.

Quelles sont les activités que vous comptez développer après le Masa ?

Après le Masa, notre plan inclut le développement d’activités axées sur la circulation des artistes. Concrètement, nous prévoyons d’apporter un soutien aux créations artistiques, qu’elles aient été sélectionnées pour le Masa ou non, en facilitant leur diffusion à travers des réseaux de programmation existants à l’échelle du continent africain et au-delà.

En considérant notre engagement à renforcer les compétences artistiques, il est évident que nous devrons également agir sur la question des réseaux afin de favoriser des collaborations plus ouvertes et fructueuses pour nos artistes.

Comment avez-vous intéressé les jeunes générations ?

Nous avons suscité un intérêt actif des jeunes générations pour le Masa en mettant en place plusieurs actions :

Nous avons donné des indications au comité artistique pour s’assurer que les jeunes générations soient bien représentées lors de cet événement.

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Nous collaborons étroitement avec les écoles pour favoriser la participation des jeunes. Cela se traduit notamment par des représentations spéciales dans la grande salle du Palais de la Culture, que nous appelons « Masa jeune public » et qui peut accueillir jusqu’à 4000 personnes par représentation. Cette activité est renforcée afin de garantir une forte implication de la jeunesse non seulement en tant que bénéficiaire, mais également en tant qu’acteur dans la création artistique.

Un appel ?

J’adresse un appel aux acteurs et professionnels du domaine culturel afin qu’ils s’approprient pleinement le Masa et contribuent à sa réussite. Je lance également un appel aux partenaires, car sans leur soutien, nous ne pourrons pas réaliser nos ambitieux projets. Votre engagement et votre collaboration sont essentiels pour atteindre nos objectifs communs.

Texte : Mano

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